mardi 26 septembre 2017

Antonio Machado et les grands mystères de la vie humaine


Antonio Cipriano José Maria Machado Ruiz, plus connu sous le nom d'Antonio Machado est né le 26 Juillet 1875 à Séville et est mort le 22 février 1939 à Collioure.

Il est l'une des figures du mouvement littéraire espagnol important connu sous le nom de "Génération de 98".

Antonio Machado

Il mélange la rêverie mélancolique et raffinée à l'inspiration terrienne.

Machado effectua plusieurs métiers dont celui d'acteur.

En 1899, il se rend à Paris avec son frère, qui avait obtenu un emploi de traducteur à la maison Garnier.
Il entre alors en contact avec les poètes Jean Moréas et Paul Fort, ainsi qu'avec Ruben Dario et Oscar Wilde.

Ces rencontres confortent Antonio Machado de devenir lui-même poète.

Nous avons séjourné récemment en Andalousie dans la belle ville de Baeza, dans la province de Jaén, où a vécu Machado.

Machado est venu à Baeza en octobre 1912, brisé par la douleur, pour enterrer sa jeune femme Leonor, âgée de 18 ans et décédée à Soria.

Machado à Baeza

Il y prend la chaire de grammaire française à l'Institut Général et Technique, situé dans le bâtiment de l'ancienne université, qui est devenue la chaire "Antonio Machado" de l'Université Internationale d'Andalousie.

Sur le mur de l'Université, nous y avons vu l'inscription suivante :



Antonio Machado publia ses premiers poèmes dans le Journal littéraire Electra, puis, en 1903, ce fut Soledades, en 1910 : Galerias, Otros Poemas, en 1912 : Campos de Castilla, en 1917 : Poetas Completas, en 1924 : Nuevas Canciones, en 1938 : Noches de Castilla,...



Sa poésie est empreinte d'une sagesse et d'une profondeur, qui lui donne une portée égale à celle des plus grands poètes.

L'oeuvre de Machado interroge constamment les grands mystères de la vie humaine, dans une contemplation attentive des hommes et du monde.



A partir de 1936, durant la guerre civile, Machado mit sa plume au service du parti républicain, et à la chute de la Seconde République espagnole, il fuit avec sa famille à Collioure, où il meurt épuisé le 22 février 1939.

En 1960, Aragon lui rend hommage dans Les Poètes, plus tard mis en musique et chanté par Jean Ferrat :

Machado dort à Collioure
Trois pas suffirent hors d'Espagne
Que le ciel pour lui se fit lourd
Il s'assit dans cette campagne
Et ferma les yeux pour toujours.

L'oeuvre du poète est dominée, à la fin de sa vie, par la réflexion poétique, philosophique et morale.

Il rassembla en 1936 un recueil de notes et fragments sous le titre "Juan de Mairena": une oeuvre placée sous le signe de l'hétéronymie, où des poètes et des philosophes fictifs expriment leurs opinions, publient leurs vers, Machado lui-même n'étant qu'un de leurs disciples anonymes.

Et quand viendra le jour du dernier voyage,
Quand partira la nef qui jamais ne revient,
Vous me verrez à bord, et mon maigre bagage,
Quasiment nu, comme les enfants de la mer.
(Champs de Castille)


Antonio Machado
Par Leandro Oroz (1925)


samedi 23 septembre 2017

Eugenio Montale : La poésie est-elle encore possible?


Eugenio Montale est un poète italien né à Gênes en 1896 et mort à Milan en 1981.

Eugenio Montale
Il a reçu le Prix Nobel de littérature en 1975.

Il est né dans une famille aisée de commerçants en produits chimiques.
Son père était d'ailleurs fournisseur de l'entreprise où était employé Italo Svevo.

Les caractéristiques de cette famille, décrites par Bianca Montale, une petite fille du poète :

"L'anxiété, la fragilité nerveuse, la timidité, la concision à l'oral et à l'écrit, une vision ayant souvent tendance à aller au pire de toute vicissitude, un certain sens de l'humour."

Eugenio poursuit des études commerciales, puis musicales avant d'intégrer l'Académie militaire de Parme.
Il cultive, en dehors de toute institution universitaire son goût pour la littérature et les langues étrangères.

Sous le fascisme oppressant de Mussolini, il est sans emploi, traduit Shakespeare, Melville, Yeats,...

Ses premières poésies paraissent dans les années vingt et il ne cessera d'écrire et de publier jusqu'à sa mort.


Son discours de réception du Prix Nobel pose cette question essentielle : "La poésie est-elle encore possible?"

Extraits :

"Il existe au monde une large place pour l'inutile; bien plus, un des dangers de notre temps est la commercialisation de l'inutile, à laquelle sont sensibles surtout les plus jeunes.

Quoiqu'il en soit, je suis ici pour avoir écrit des poèmes, produit totalement inutile mais rarement nuisible, et c'est là un de ses titres de noblesse.

Mais ce n'est pas le seul, la poésie étant une production ou une maladie absolument endémique et incurable."


"On a dit que ma production était maigre, à supposer peut-être que le poète produise des marchandises, car les machines doivent être utilisées au maximum.

Heureusement, la poésie n'est pas une marchandise."


"Tous les arts se démocratisent, au mauvais sens du mot. L'art produit des objets de consommation à utiliser puis à jeter, en attendant un monde dans lequel l'homme parviendrait à se libérer de tout, même de sa propre conscience."

"Mais pourquoi aujourd'hui plus que jamais l'homme civilisé est-il arrivé à se prendre en horreur?...
Les communications de masse, la radio, et surtout la télévision ont tenté non sans succès d'anéantir toute possibilité de solitude et de réflexion...



"La poésie pourra-t-elle survivre dans un monde de communication de masse?"

"La grande poésie peut mourir, renaître, mourir à nouveau mais restera toujours une des cimes de l'esprit humain."

Voir ici.